Avec les premiers gros départs, les voleurs peuvent dérober jusqu'à 10 000 euros par jour
"Yacine, viens me voir ! Qu’est ce que tu fous ? - Rien, je te jure. Y’a personne, aujourd’hui. On fait rien. — Bon allez, sortez vite de là, avant que ça tourne mal pour vous". Surpris quasiment en flagrant délit sur le Port autonome, circulant entre les files de voitures dans l’attente d’embarquer vers le Maghreb, Yacine et Mohamed portent beau. Pas le genre voleur, plutôt celui de voyageurs fortunés, qui rentrent au "bled" pour les vacances.
Stéphane, fonctionnaire de la Bac Nord, connaît par cœur les deux pickpockets. Depuis trois ans qu’il œuvre pour la sécurité du port autonome, il a pu mesurer les dégâts immenses que réalisent le duo et leurs acolytes. Ce week-end, avec le premier grand rush de voyageurs, leur chiffre d’affaires devrait d’ailleurs atteindre des sommets, à peine concevables. "Chaque jour, ils peuvent gagner entre 5 000 et 10 000 €, déplore Stéphane. Les familles qui rentrent au pays emportent très souvent de fortes sommes d’argent, en liquide. En plus, pour ne pas rater le bateau, ils déposent rarement plainte".
Ils sont une bande de sept à dix professionnels, entre 40 et 65 ans, à se partager le territoire sur le port. Leur méthode, le vol par ruse, ne varie guère. D’apparence tout à fait respectable, ils se font passer pour des passagers et engagent la conversation avec d’autres voyageurs en attente d’embarquer, avant de passer à l’action. Stéphane les repère de très loin : "Ils sont là tous les jours. Dès qu’ils nous voient, ils s’enfuient en sautant les grilles. Mais face à leurs victimes, ils sont très très performants. Yacine, celui que vous avez vu, a même l’habitude de porter un costume bien coupé pour inspirer encore plus confiance".
La principale technique consiste à détourner l’attention des gens se trouvant à proximité de la voiture, pendant qu’un complice se glisse à l’intérieur et dérobe la sacoche ou le sac contenant les billets. "Pour certains, ce sont des économies de plusieurs années qui disparaissent d’un coup. La dernière fois, Yacine a failli prendre un coup de couteau après avoir dérobé l’argent d’une vielle dame. Le fils est devenu fou. Le voleur a réussi à s’enfuir".
Ce marché particulièrement juteux suscite aussi les convoitises d’autres équipes, plus jeunes, qui agissent très différemment. Si les pickpockets ne maltraitent jamais leurs victimes, des voleurs plus jeunes n’hésitent pas à cogner pour arracher les sacs contenant les billets. À l’extérieur, la nuit, à proximité de la porte Chanterac, où des files de véhicules s’étendent parfois sur plusieurs centaines de mètres, se joue des scènes encore plus violentes. "Là, c’est le domaine des braqueurs, précise un enquêteur. Des malfaiteurs arrivent quelquefois sur des scooters avec des fusils à pompe. Ils attaquent deux ou trois voitures et repartent avec le magot."
Publié dans La Provence le samedi 30 juin 2007
Romain Luongo (rluongo@laprovence-presse.fr)
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